Thursday, October 28, 2010

Tout va bien, The kids are alright, de Lisa Cholodenko

Nic et Jules sont les deux mamans de Laser et Joni, demi-frère et sœur issu du même donneur à la banque du sperme. Lorsque Joni a dix-huit ans, elle répond au désir de son frère de connaître leur père biologique. Paul accepte de les rencontrer, et d'assumer un peu cette paternité tardive, à leur demande. Nic et Jules sont bien forcées de l'intégrer dans leur cocon familial.




Ce film a tout d'abord un titre ridicule en français. Quel est l'intérêt de traduire l'anglais pour le conserver derrière, à part un effet redondant? Il semblerait que le titre anglais n'ait pas de rapport avec la chanson de The Who. Ce point étant souligné, tout le reste du film va parfaitement bien, en effet. 


Lisa Cholodenko prend le parti risqué d'intégrer deux thématiques pas faciles à aborder: l'homosexualité parentale et l'anonymat des donneurs de sperme. Elle laisse ces deux sujets légèrement de côté, les conservant uniquement comme composantes inhérentes à la vie de ses personnages, et elle se concentre sur les relations familiales et sur les ruptures qu'une famille traverse forcément, alors que les enfants grandissent et que les parents vieillissent. On ne s'appesantit jamais sur ce fait que deux femmes vivent ensemble et élèvent ensemble des enfants; le lien qui les unit entre elles, et avec leurs enfants, est suffisant. Cette vie de famille "banale" est par ailleurs traitée avec finesse et justesse, avec des scènes de questionnements des deux parents sur l'oreiller, une sexualité difficile à assumer avec deux enfants dans les chambres à côté et la quarantaine qui sonne, des réunions au sommet qui réunissent tous les membres pour une discussion à cœur ouvert. Rien que du très vrai, et merveilleusement retranscrit, avec de petites joies, des inquiétudes, un grand amour.


Paul n'est pas jugé non plus pour son rôle de père absent et tout à coup responsable de deux gamins. Il se trouve juste là soudainement, propulsé par la force de conviction de ses enfants biologiques. Et son implication dans la vie ordonnée de ces deux femmes qui s'aiment mais qui s'éloignent, à cause du temps qui passe, de leurs petits différents qui s'accumulent, de la peur de voir leurs enfants s'éloigner, et la glue qui les maintient ensemble fondre doucement avec eux, peut-être. Paul n'a jamais désiré avoir d'enfants, il est libre, possède son restaurant et ses convictions, sa routine; sa vie à lui aussi est bouleversée, et il change, subtilement.


Quant à Laser et Joni, ils pourraient être les personnages centraux de l'histoire, mais laissent généreusement la place à leur groupe tout entier. Ils déclenchent les changements, mais cette origine ne les laisse pas avoir un premier rôle à part entière. C'est de liens dont on parle, c'est d'une famille dont il s'agit. Lisa Cholodenko ne traite pas non plus d'un malaise d'adolescent, mais le thème est également présent. Simplement, elle refuse de caricaturer en mettant en valeur un sujet ou un autre, et conserve sa finesse de narration en montrant une Joni qui se demande ce que son corps désire, et un Laser encore gamin qui se cherche un modèle masculin sur lequel s'appuyer. Ni l'un ni l'autre ne traverse de crise boutonneuse et colérique, de celles qui font généralement le bonheur des cinéastes.


 Lisa Cholodenko effectue le parfait dosage entre marginalité et équilibre d'une famille qui aborde une crise, entre heurts et réconciliations, entre rires et disputes. Elle réalise avec justesse un film sur le quotidien.


Tout va bien, The kids are alright
de Lisa Cholodenko
avec Julianne Moore, Annette Bening, Mark Ruffalo,...
sortie française: 6 octobre 2010

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