Wednesday, April 11, 2012

Before sunrise - Before sunset, deux films de Richard Linklater, avec Julie Delpy (et Ethan Hawke) dedans

Ayant récemment vu 2 days in New York, et repensé à 2 days in Paris, j'ai également parcouru quelques articles et interviews concernant Julie Delpy. Cette fille apparaît vraiment comme un étrange ovni - si un ovni peut vous sembler un évènement tout à fait normal et plausible - dans le monde du cinéma; elle ressemble vraiment à l'idée que je me fais d'une artiste, touche-à-tout, prête à s'offrir en cobaye, en terrain d'expérimentation, je-m'en-foutiste du qu'en-dira-t-on, à faire, à faire "de l'art, pour l'art". Aussi prétentieux que ce but puisse paraître, Julie Delpy n'a vraiment aucune image à défendre. Elle fait des films, un point, c'est tout. Elle semble se foutre de sa crédibilité, de l'opinion, être en dehors d'un star-system. Je ne souhaite pas lui faire une déclaration d'amour, mais je suis suffisamment séduite pour avoir envie d'en savoir plus. Et, pour connaître un artiste, je ne pense pas que le "stalker" soit une bonne idée; non, je crois plutôt qu'il faut voir ses œuvres. Allez savoir pourquoi, au hasard d'une interview, le réalisateur Richard Linklater est resté dans mon esprit, et c'est tout naturellement que je me suis jetée sur les films Before sunrise, réalisé en 1995, et Before sunset, en 2004 , pour découvrir l'actrice Julie Delpy (évidemment, elle joue aussi dans ses propres films, que j'ai vu, mais, dirigée par un autre réalisateur, c'est encore différent).


Before sunrise a donc été réalisé il y a maintenant 16 ans. Julie Delpy est plus jeune d'autant d'années, et c'est le premier intérêt du film, pour qui veut en apprendre plus sur elle. On cherche toujours à fouiller de vieux tiroirs, rassembler des photos du passé de la personne qu'on cherche à comprendre. Le film fait se rencontrer dans un train deux parfaits étrangers; elle est française, et rentre à Paris après un voyage en Bulgarie; lui est américain, et a perdu du temps à voyager en Europe, d'abord pour une histoire d'amour mal terminée, et rentre à présent aux Etats-Unis. Les deux jeunes gens discutent, et décident brutalement de descendre du train à l'arrêt du jeune homme, à Vienne, pour passer une nuit ensemble et prolonger leur temps. L'histoire fait se rencontrer deux cultures, ce qui est le sujet des 2 days in... de Julie Delpy, voilà la seconde raison probable qui m'a fait me tourner vers ce film plutôt qu'un autre. La troisième et dernière raison est que Before sunset, réalisé presque dix années après, fait de nouveau se rencontrer les deux protagonistes du film. Malgré leur promesse de se revoir en un lieu et une date précis, ils ne sont pas pas recroisés, et se rencontrent enfin à nouveau, au hasard. Un peu comme dans les 2 days in..., on retrouve les mêmes personnages, vieillis d'autant d'années que les réalisateurs ont mis le temps à penser leur nouveau scénario. C'est toutes les similarités de ces films, car Before sunset et Before sunrise sont loin de ce qu'a pu réaliser Julie Delpy.


Before sunrise est le film le plus romantique que j'ai vu depuis longtemps. Et vous pourrez me sortir toute la liste des films avec Tom Hanks,  Meg Ryan ou Julia Roberts dedans, Before sunrise est celui que je voudrais revoir entre tous, entre filles ou avec un amoureux. Il a, en plus d'être une belle romance, la qualité d'être bien écrit et bien réalisé, ce qui n'est pas le cas des autres bouillies de guimauve évoquées ci-dessus. Before sunrise est le condensé, en vingt-quatre heures, d'une histoire d'amour qui vole tout de suite au-dessus des autres; la rencontre improbable de deux personnes qui se correspondent. Ayant une fin programmée par un vol d'avion, les sujets de tous les couples sont pris en compte, questionnés, et envisagés à la fois avec le plus grand des sérieux, et la légèreté d'un début. La conversation qui s'étale dans le temps n'est pas forcément à bâtons rompus; parfois, les thèmes les plus graves sont pris avec le sourire, et d'autres, plus légers, semblent lourds comme la pierre. Les dialogues sont évidemment primordiaux et bien écrits. Les acteurs incarnent la candeur de l'espoir, en parlant de choses qui, bien souvent, mal interprétées, ne sont qu'un paquet dégoulinant de bons sentiments.


Ils se baladent, au hasard, mais savent aussi se poser à des endroits pour y arrêter la caméra, ne pas occuper l'espace avec des gestes ou des marches forcées. Ils rencontrent parfois des gens, pour discuter avec d'autres, mais la plupart du temps restent entre eux, sans que l'on ne se sente trop en promiscuité. Maîtrisé, sensible, délicatement réalisé - j'ai tout particulièrement adoré ces quelques plans des endroits visités la nuit, vide au matin, alors que chacun s'en va finalement de son côté, en train ou en bus pour rejoindre un avion -, Before sunrise est un film d'une époque, profondément ancré dans les années 90, et dans le temps d'une rencontre, mais aussi particulièrement intemporel et qui donne un sens à des sentiments.


Dans Before sunset, Jesse a écrit un livre sur l'histoire de leur rencontre, et en fait la promotion à travers l'Europe. Son petit tour se termine à Paris, dans la célèbre librairie Shakespeare & co du 6ème arrondissement, où Céline, qui a vu son portrait dans un journal, et lu son best-seller, le retrouve. Jesse est maintenant marié, et a un enfant; Céline vit une histoire avec un photographe. Ils n'ont cette fois que quelques heures à passer ensemble, des explications à se donner, neuf années et même plus à rattraper. On ne sait pas pourquoi ils ne se sont pas retrouvés, comme ils s'en étaient fait la promesse, neuf ans auparavant; on s'interroge sur un futur possible commun, ou sur un choix plus adulte, celui de deux inconnus qui se revoient et font simplement un point sur leurs vies.


D'un côté de la Seine à l'autre - voire même en passant dessus -, Before sunset est l'occasion d'une balade à Paris. Pas très véridique, elle nous balade cependant dans de jolis quartiers, légèrement clichés et aussi terriblement vrais; ce sont des rues étroites, de vieux bâtiments, des cafés ambiancés, des cours fleuries; on ne trouve pas cela à tous les coins de rue, mais ces atmosphères typiquement parisiennes existent bel et bien, et Richard Linklater ne nous embarque pas uniquement de la Tour Eiffel à St Germain, loin de là. C'est dans le 12ème qu'il préfère mettre les pieds, sur la Coulée Verte, dans la rue de Paradis... Plutôt que des monuments, il retranscrit joliment une atmosphère parisienne.


Dans le temps restreint qu'ont Jesse et Céline à passer ensemble, on se déplace beaucoup plus que dans Before sunrise. Pas d'ellipses, ni temporelles ni de lieu: on suit pas à pas les personnages, et on a absolument tous les détails de leur conversation. La caméra suit avec beaucoup de simplicité ces pérégrinations pédestre ou en voiture, pour laisser la place à un dialogue ciselé.


Vous avez déjà retrouvé quelqu'un, dont vous aviez été séparé depuis longtemps? Dans ces moments-là, une certaine gêne apparaît; on parle de la pluie, du beau temps, on évoque des sujets factuels: es-tu marié, as-tu des enfants? Jesse et Céline ponctuent leur conversation de tels sujets, par gêne, et aussi par soif d'apprendre quelle place ils ont prise dans la société. Leur intimité revient aussi; le sexe, évidemment, est un sujet qu'ils veulent aborder. La nuit qu'ils ont passé ensemble a été celle de deux enfants, ou presque, et ils ont maintenant connu des partenaires, se sont installés...


Toujours hésitants, entre le romantisme, auquel ils ne croient pas, et la distance, à laquelle ils ne peuvent se résoudre, Jesse et Céline ne s'arrête jamais de parler; à bâtons rompus, parfois; entrecoupant les discours de silences, pas trop longtemps; sur tous les thèmes. Céline notamment, si prude, presque fermée, dans Before sunrise, parle avec volubilité. Elle se livre, sans s'arrêter de parler, pour combler les années de distance; Jesse écoute beaucoup, avec une pudeur toute américaine; lui a écrit un livre entier pour la retrouver.


Qu'ai-je appris sur Julie Delpy avec tout cela, je vous le demande? Pas grand chose, ma foi, mais j'ai découvert deux films que jamais je n'aurais pensé à regarder si ce n'était en m'intéressant à cette artiste.


Before sunrise
sortie française: mars 1995

Before sunset
sortie française: mars 2005

de Richard Linklater
avec: Julie Delpy, Ethan Hawke,...

No comments: