Friday, March 28, 2014

Like father, like son, de Kore-eda Hirokazu

Ryoata travaille dur, comme architecte d'abord, mais aussi comme père de famille, pour l'avenir de son fils de six ans. Le petit Keita se plie aisément à sa routine, sous l'oeil attendri de sa mère, plus présente que Ryota. L'équilibre de la famille est bouleversé quand l'hôpital dans lequel est né Keita découvre son erreur: Keita et un petit Ryusei, qui ont exactement le même âge, ont été échangé. Ryusei a grandi dans une famille modeste, joyeuse, et bordélique. Pour chacun des parents, la même question: faut-il échanger de nouveau les enfants?


Les Français penseront forcément à La vie est un long fleuve tranquille. Après leurs points de départ, les deux films ne suivent pas du tout la même thèmatique, et montrent peut-être l'écart qui existe entre les douces réflexions japonaises et la bonhomie franchouillarde. Les deux petits garçons qui échangent leurs parents vont forcément vivre des situations comiques, mais ici, elles seront gentillement tendres. Le Japonais s'attarde plus sur la situation du père, plutôt que de suivre les enfants; il s'interroge cependant toujours, comme dans ses autres films, sur les liens familiaux.


Deux petits garçons, deux couples, deux mères et deux pères. Keita est cependant isolé, et on n'aperçoit le vrai fils de Ryota qu'assez peu. L'enfant semble heureux, mais toujours étonné, docile, fragile. Ses parents le protègent tant qu'il prend peu d'initiatives. Il apprendra à s'abandonner un peu auprès de ses nouveaux parents. Cette éducation stricte et protectrice est dictée par Ryota, lui-même blessé dans son enfance par le remariage de son père. 


Chacun des parents est vu avec en face, son miroir. Ryota est un homme sûr de lui, admiré dans son travail, ne comptant pas ses heures, respecté par sa femme et craint par son enfant. Il pense être un bon père, car il donne à Keita la meilleure éducation possible, et lui apprend les bases pour savoir vivre, un jour, seul dans le monde des adultes. Quand le vrai père de Keita lui apparaît, il découvre également une autre manière d'être père, opposée à la sienne. Il se rend alors compte qu'à force de vouloir toujours être un exemple idéal pour Keita, il oublie de l'aimer. Et il s'interroge: après six années, est-il encore temps d'aimer cet enfant, qui n'est même pas son fils biologique?


De la même manière, la mère de Keita se retrouve face à une autre femme. Alors que les hommes s'opposent, elles, se ressemblent, réunies par la douleur de n'avoir pas su, six ans auparavant, faire la différence entre leur propre progéniture, et un petit imposteur. L'instinct maternel a été aboli, dans une société où les sentiments sont contrôlés. Elles prennent sur elles la responsabilité et la faute, mais accusent aussi leurs maris de ne pas savoir gérer la situation présente dans laquelle elles se retrouvent. Pour elles, tout est simple: elles ont éduqué un enfant et elles aiment chacune leur enfant; il n'est pas question que cela change.


Keita, lui, est vu dans sa solitude d'enfant, sans être comparé autant que les adultes, à son double. Kore-eda Hirokazu, en l'isolant ainsi, montre d'autant plus son incompréhension. Deux mondes s'opposent, pas seulement celui, feutré, d'une famille, et l'autre, explosif, d'une autre famille, mais un monde de sentiments d'enfants, en face de celui réfléchi et pas forcément juste, des adultes. 


Like father, like son
de Kore-eda Hirokazu
avec: Masaharu Fukuyama, Machiko Ono, Keita Ninomiya,...
sortie française: 25 décembre 2013
sortie australienne: 17 avril 2014

3 comments:

Mingou said...

J'ai adoré ce film, qui pose plein de questions et qui est absolument bouleversant.

Fanny B. said...

Si tu ne les connais pas encore, essaie de voir les autres films de ce réalisateur! Mon préféré: Nobody knows

Mingou said...

J'avais bien aimé I wish (nos vœux secrets), mais effectivement, Nobody knows m'intéresse particulièrement car j'en ai entendu beaucoup de bien.